📘 Pour McKenzie Wark : Un manifest Hacker

Je resposte ici un article que j'avais posté sur un ancien blog militant.

C'est un résumé du livre Un manifest Hacker écrit par la/le philosophe McKenzie Wark.

Écrit en 2006, ce livre reste pour moi une référence pour aborder théoriquement la philosophie politique à l'heure des réseaux sociaux.

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Un marxiste 2.0

L'ouvrage commence par un détournement, style propre à Guy Debord (Membre de l'international situationiste), de la première phrase du Manifeste du Parti de Karl Marx :

Un spectre hante le monde, le spectre de l'abstraction. Les fortunes des États et des armées, des entreprises et des communauté en dépendent. Toutes les classes en luttes, dirigeantes ou dirigées, le révèrent et même le craignent. Notre monde est celui qui s'est aventuré, en aveugle croisant les doigts, dans le nouveau.

Les classes sociale

McKenzie Wark voit 6 classes sociales distincte qui sont définie par leur moyens de productions:

Classes social Moyen de Production Classe antagonique
Pastoraliste Champs / Prairie … Paysannerie
Capitalisme Industries / usine / forge … Prolétariat
Vectorialiste Information / moyens de communication Hacker

La classe vectorialiste

Pour McKenzie Wark, c'est LA nouvelle classe social qu'il faut combattre. Dans un schéma marxiste, la classe vectorialiste se définie son contrôle et la propriété privé de l'information, des données et des moyens de communication.

Thèse numéro 335 :

Le vecteur exerce un pouvoir sur le monde entier, mais un pouvoir qui n'est pas distribué également. Rien dans la nature du vecteur ne détermine s'il peut être déployé ici plutôt qu'ailleurs, entre ces gens plutôt que d'autres, entre ces villes plutôt qu'entre ces arrière-pays, entre ces empires plutôt qu'entre ces périphéries. Rien ne permet de dire dans l'abstrait, du vecteur, que les flux qui le parcourent doivent aller dans une seule direction, du patron à la petite main, de la métropole à la province, de l'empire à la colonie, du monde surdéveloppé au monde sous-développé. Et c'est pourtant ce que fait le vecteur, tel que nous l'observons. Cette application encore limitée d'un potentiel illimité est la véritable condition du vectoral. Comme forme en géométrie, un vecteur est une ligne d'une portée finie, mais d'une position indéterminée. Comme forme en technologie, un vecteur est un moyen de mouvement, qui a des qualités finies de vitesse et de puissance, mais pas d'application prédéterminée. Un vecteur est en partie déterminé, en partie ouvert. Un vecteur est en partie réel, en partie virtuel. Tout ce qui est déterminé par la technologie constitue la forme dans laquelle l'information est objectivée, mais ni le lieu et ni comment. Le fait que le développement vectoral soit un développement inégal demande une analyse qui aille au-delà du fétichisme de la technique, jusqu'à la forme de pouvoir de classe qui s'empare de l'ouverture virtuelle et la restitue comme inégalité réelle.

Les sites internet Facebook ou google sont typiquement des représentants typique de la classe vectorialiste : les entreprises produisent ou s'accaparent des informations ainsi que leur moyens de diffusion. Cependant, parce que leur production n'est pas déterminé de manière finit (l'information), il est possible de hacker ou de détourner ces sites, c'est à dire de les utiliser pour d'autres fins que ceux initialement prévu. Il n'en reste pas moins une abstraction, un éloignement de la propriété privé.

L'histoire

Thèse numéro 89 :

L'histoire est elle même une abstraction, hacké a partir de l'information récalcitrante, laissé pour compte des confrontations productives du présent qui s'intrique avec le passé. De l'information exprimée par les événements, l'histoire forme des ordres de représentation objectif de la situation objectif et subjective.

En tant que marxiste, McKenzie Wark considère l'histoire comme résultant des luttes de classes. Il réécrit une histoire de l'État en apportant des éléments de conceptions marxiste. L'auteur revient sur le passage d'une société agraire et féodale (la classe pastorialiste) qui se transforma avec l'état-nation grâce à la classe hacker (lumière issus de l'imprimerie ). Les capitalistes se servirent de l'État pour transformer leur pouvoir sur le monde paysan en pouvoir sur le monde industriel. Il le feront ensuite pour passer du monde industriel au monde vectorialiste. McKenzie insistes sur le fait que ces passages de pouvoir (Agriculture -> Capitalisme -> Vectorialisme) se font avec une abstraction toujours plus grande la propriété. Ces propriétés sont toujours plus abstraite, de moins en moins liés à la matérialité de la nature.

Pourtant, à la différence de la pensé marxiste traditionnel ou anarchiste, l'auteur pense que l'état peut être utilisé par les classes productives pour servir leurs intérêts grâce à l'impôt par exemple.

L'information

Thèse 126

L'information tend à être libre, mais partout elle est enchaînée.

Thèse 127

L'information est immatérielle, mais elle n'existe jamais sans support matériel. L'information peut être transférée d'un support matériel à l'autre, mais ne peut pas être dématérialisée [...]. L'information émerge en concept quand elle accomplit une relation abstraite avec la matière. Cette abstraction de l'information, en tout support matériel particulier, crée la véritable possibilité d'une société vectorale, et produit le nouveau terrain du conflit de classe : le conflit entre la classe des vectoralistes et la classe Hacker.

Propriété

Un chapitre entier comprenant 30 thèses sont consacré à la question de la propriété. L'auteur revient sur la notion de propriété de l'information qui diffère des autres formes de propriété dans le sens où le prix de la copie de cette propriété est quasi nul. Pour autant, l'information, surtout quand elle réfère à des identités, est pouvoir oppresseur.

L'auteur traite aussi des différentes formes de propriétés issus des différentes étapes de l'Histoire (Pastorialiste, Capitaliste, Vectorialiste)

Thèse 190 :

[...] De même que les paysans et les ouvriers se trouvèrent confrontés à une classe possédant les moyens de produire, de stocker et de distribuer l'information : la classe des vectorialiste. La classe des vectoralistes lutta en premier lieu pour établir son monopole sur l'information - une forme de de propriété bien plus abstraite que celle du sol ou du capital - et ensuite pour établir son pouvoir sur les autres classes dirigeantes. Elle se garantit la plus grande part possible du surplus, comme marge - les recettes de la propriété de l'information aux dépens du profit et de la rente.

Il propose le don comme moyen de lutte contre la marchandisation de la propriété de l'information tout en sachant que cela peut être "Le prix à payer à l'État pour l'avancement de ses intérêts principaux". Enfin il conclue en attestant que "L'économie du don "est la preuve virtuelle de la nature parasite et superflue des vectoralistes comme classe.

Conclusion

McKenzie Wark, ça rafraîchit, c'est fort. Par ailleurs c'est écrit en 2006, soit juste avant que le WEB 2.0 pointe le bout de son nez.

Je pense que c'est prémonitoire dans le sens où la classe vectoraliste n'est qu'au début de l'hégémonie qu'elle va prendre sur la société. Jour après jours nous passons d'un capitalisme financier à un capitalisme de l'information.

Viendra le temps où l'on regrettera notre époque !

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